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Prévention de la pénibilité : le dispositif est réformé

Obligation de déclaration des expositions et ouverture d’un compte de prévention pour 6 facteurs de risques (au lieu de 10), suppression des cotisations pénibilité et modification du champ des entreprises tenues d’avoir un accord ou plan d’action sont les modifications apportées au dispositif.

  • Ord. 2017-1389 du 22 septembre 2017

Le dispositif de prévention de la pénibilité est maintenu dans son principe mais est aménagé. Tout d’abord, il n’est plus fait référence à la pénibilité. L’ordonnance 2017-1389 du 22 septembre 2017 évoque désormais la prévention des effets de l’exposition à certains facteurs de risques professionnels. Au-delà de ce changement terminologique, les modifications portent principalement sur l’obligation de négocier un accord ou d’établir un plan d’action en faveur de la prévention et sur le compte ouvert aux salariés exposés à certains facteurs de risques.

Définition des risques professionnels

S’agissant de la définition des risques professionnels, l’article 1er de l’ordonnance reprend ceux déjà retenus dans l’ancien dispositif en intégrant dans la partie législative du Code du travail les facteurs mentionnés actuellement à l’article D 4162-2 dudit Code. Il s’agit ainsi de ceux liés (C. trav. art. L 4161-1 modifié) :

- à des contraintes physiques marquées : manutentions manuelles de charges ; postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ; vibrations mécaniques ;

- à un environnement physique agressif : agents chimiques dangereux, y compris les poussières et les fumées ; activités exercées en milieu hyperbare ; températures extrêmes ; bruit ;

- à certains rythmes de travail : travail de nuit, tel que défini par le Code du travail (art. L 3122-2 à L 3122-5) ; travail en équipes successives alternantes ; travail répétitif caractérisé par la réalisation de travaux impliquant l’exécution de mouvements répétés, sollicitant tout ou partie du membre supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte.

Il est toujours renvoyé à un décret pour la définition de ces facteurs. 

Accord ou plan d’action en faveur de la prévention : un champ d’application modifié

Le champ des entreprises tenues d’être couvertes par un accord collectif ou, à défaut, par un plan d’action, en faveur de la prévention est modifié.

Ainsi, les entreprises d’au moins 50 salariés, ainsi que celles appartenant à un groupe, au sens de l’article L 2331-1 du Code du travail relatif au comité de groupe, d’au moins 50 salariés sont toujours soumises à cette obligation lorsque, comme aujourd’hui, elles emploient une proportion minimale fixée par décret, de salariés déclarés au titre du compte appelé désormais compte professionnel de prévention. Cette proportion minimale est actuellement fixée, par l’article D 4163-1 dudit Code pour le compte pénibilité, à 50 % de l’effectif (25 % à compter du 1er janvier 2018). Aucune modification de ce taux n’a été annoncée à notre connaissance. Toutefois, moins d’entreprises devraient être concernées par ces dispositions, le champ d’application du compte étant réduit (voir ci-après). Mais, par ailleurs, l’ordonnance élargit le périmètre des entreprises visées par cette obligation à celles remplissant la même condition d’effectif que ci-dessus, dont la sinistralité au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est supérieure à un seuil déterminé par décret à paraître (C. trav. art. L 4162-1 modifié).

L’ordonnance n’apporte en revanche aucune modification concernant le contenu de l’accord ou du plan d’action, sa durée et la pénalité encourue en cas de non-respect de son obligation par l’employeur.

Les nouvelles dispositions entrent en vigueur le 1er janvier 2019 (Ord. art. 5, IV). 

Le compte pénibilité devient le compte professionnel de prévention

Le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) est désormais dénommé compte professionnel de prévention (C2P). Rappelons qu’il permet aux salariés exposés à certains facteurs de risques d’accumuler des points en vue de suivre une formation permettant une reconversion dans un emploi moins pénible, de passer à temps partiel ou de partir plus tôt à la retraite.

Les modifications apportées au dispositif concernent essentiellement les facteurs de risques pouvant être pris en compte, la gestion du compte et son financement.

Facteurs de risques pris en compte

Depuis le 1er octobre 2017, le compte professionnel de prévention n’est ouvert qu’aux salariés exposés à un ou plusieurs des facteurs de risques suivants au-delà des seuils réglementaires : activités exercées en milieu hyperbare, températures extrêmes, bruit, travail de nuit, travail en équipes successives alternantes, travail répétitif (C. trav. art. L 4163-1 modifié).

Ne sont donc plus visés ceux exposés aux facteurs suivants : manutentions manuelles de charges lourdes, postures pénibles, vibrations mécaniques, agents chimiques dangereux.

Les employeurs n’ont donc plus à évaluer ni à déclarer l’exposition de leurs salariés à ces 4 derniers facteurs depuis cette date (Ord. art. 5, IV). 

Peu de modification concernant les règles d’utilisation

Les règles d’utilisation du compte ne sont pas modifiées par l’ordonnance. Celle-ci ajoute seulement que lorsque son titulaire décide d’utiliser ses points pour suivre une formation, et que la durée de l’action est plus longue que ce que permettrait le CPF, les heures de formation complémentaires peuvent être financées par la branche accidents du travail/maladies professionnelles de la sécurité sociale (C. trav. art. L 6323-4 modifié).

Les points acquis au titre du C3P non utilisés avant le 1er octobre 2017 sont transférés sur le compte professionnel de prévention. Les points inscrits sur le C3P avant cette date sont utilisés selon les dispositions réglementaires prises pour l’application de ce dernier compte jusqu’à la publication des décrets d’application relatifs au C2P, et au plus tard jusqu’au 1er janvier 2018 (Ord. art. 5, V).

Les cotisations pénibilité sont supprimées

Les cotisations pénibilité (cotisation de base due par tous les employeurs et cotisation additionnelle due par les employeurs ayant exposé des salariés à des facteurs de risques au-delà des seuils réglementaires) sont supprimées à partir du 1er janvier 2018 . Toutefois, pour le 4e trimestre de 2017, la cotisation additionnelle est due par les seuls employeurs ayant exposé au moins un de leurs salariés aux 6 facteurs de risques professionnels permettant l’ouverture du C2P (voir ci-dessus). Seuls les rémunérations ou gains des salariés exposés à ces 6 facteurs sont pris en compte dans le calcul du montant de cette cotisation (Ord. art. 5, II, 2°). 

La gestion du compte est assurée par la branche AT/MP

A partir du 1er janvier 2018, les dépenses engendrées par le compte de prévention sont couvertes et la gestion de celui-ci assurée par la branche accidents du travail/maladies professionnelles du régime général et celle du régime agricole, chacune pour ce qui la concerne, dans des conditions fixées par décret à paraître (C. trav. art. L 4163-21 nouveau).

Source : Editions Francis Lefebvre 2017