Blog Droit fiscal

Au plus tard le 30 juin 2016 devrait être librement accessible le fameux registre de tous les trusts que l’Administration fiscale a répertorié, pour avoir fait l’objet d’une déclaration conformément aux dispositions de l’article 1649 AB du CGI.

En application de ce dernier doivent en effet être déclarés à l’Administration fiscale française tout trust dont les constituants, administrateurs ou bénéficiaires sont résidents fiscaux français, ou qui est constitué (même pour infime partie) de biens français.

La création de ce registre des trusts a été organisée par un récent décret du 11 mai dernier. Les informations qui pourront être obtenues sont les suivantes : la dénomination et l’adresse du trust, la date de sa constitution, éventuellement la date de son extinction ainsi que l’identité du constituant, du ou des bénéficiaires et de l’administrateur.

La seule limite (si cela en est une) au libre accès à ce registre est la conservation pendant un an par l’Administration fiscale des coordonnées de connexion internet de la personne consultant le registre !

En l’état ce registre public des trusts va donc très probablement créer un mini « Panama Papers » initié et organisé par l’Administration fiscale française elle-même puisqu’une quantité très importante d’informations jusque-là confidentielles va subitement être accessible à tous.

Dire que ce registre publics laisse songeur quant à son intérêt mais aussi quant à sa légalité est une litote.

S’agissant de son intérêt tout d’abord, quel peut bien être l’intérêt de l’Administration fiscale de mettre ainsi en ligne toutes les informations qu’elle a recueilli et dont elle dispose déjà, puisque par définition tous les trusts qui figureront sur ce registre seront parfaitement en règle avec la fiscalité française ?

Il faut donc en conclure que le but ultime est purement et simplement de livrer à la potentielle vindicte populaire les personnes qui ont le malheur d’avoir constitué ou d’être les bénéficiaires d’un trust… dont il convient pourtant de rappeler qu’il s’agit d’un outil juridique parfaitement légal et expressément appréhendé par le droit français depuis quelques années.

Le seul but du législateur semble donc bien de participer à cette hystérie collective visant à faire de la transparence absolue la norme suprême et à faire de chacun d’entre nous des délateurs en puissance ainsi que les observateurs obscènes du patrimoine d’autrui.

A tout prendre pourquoi ce registre public des trusts ne serait-il pas une première étape ? Pourquoi, demain, ne mettrait-on pas en ligne toutes les bases de données de l’Administration fiscale, comme les revenus ou le patrimoine ISF déclarés par chacun, les comptes bancaires ou contrats d’assurance vie ?

Que les contribuables aient des comptes à rendre à l’Administration fiscale est un fait mais qu’ils doivent se mettre à nu devant tous est une violation caractérisée du droit au respect de la vie privée.

Les personnes concernées ne doivent donc pas hésiter à contester tout azimut la légalité de ce registre des Trusts.