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Focus sur les principales modifications apportées par la directive 2007/47/CE relative aux dispositifs médicaux

La réglementation encadrant les dispositifs médicaux va évoluer du fait de la publication de la directive 2007/47/CE du 5 septembre 2007 qui modifie notamment la directive 93/42/CEE.

Cette directive devra être transposée en droit interne avant le 21 décembre 2008 et ces dispositions devront s’appliquer avant la fin de la période transitoire dont le terme est fixé au 21 mars 2010. Cet article se penchera sur les principales modifications touchant les dispositifs médicaux (DM), notamment celles apportées à leur définition, aux conditions conférant aux logiciels la qualité de dispositif médical, aux exigences en termes d’évaluation et enfin à leur retraitement.

I - Les contours de la définition des DM précisés

Pour certains dispositifs médicaux « frontières », pour lesquels il existe une incertitude sur le régime réglementaire applicable, la directive 93/42/CEE ne présentait pas un fonctionnement efficace.

Désormais, pour les dispositifs libérant des principes actifs, à mi-chemin entre dispositif et médicament, la directive indique que ce type de dispositif médical est régi par elle et non par la directive sur les médicaments.

En effet, la directive prévoit que « lorsqu’un dispositif incorpore comme partie intégrante une substance qui, si elle est utilisée séparément, est susceptible d’être considérée comme un médicament et qui peut agir sur le corps humain par une action accessoire à celle du dispositif, la qualité, la sécurité et l’utilité de cette substance doivent être vérifiées par analogie avec les méthodes prévues à l’annexe I de la directive 2001/83/CE. »

En d’autres termes, les DM qui incorporent un principe actif pouvant être considéré comme un médicament seront régis par la directive 2007/47/CE mais devront être vérifiés en tenant compte des méthodes précises définies par la directive européenne sur les médicaments à usage humain.

Cette vérification incombera à l’organisme notifié, qui, après avoir vérifié l’utilité de la substance en tant que partie d’un dispositif médical et en tenant compte de la destination du dispositif, demandera un avis scientifique à l’une des autorités compétentes.

II - Les produits dangereux partie intégrante du dispositif médical

Certains dispositifs sont destinés à administrer dans l’organisme et/ou à retirer de l’organisme des médicaments, des liquides biologiques ou autres substances ou encore sont destinés au transport et au stockage de ces liquides ou substances.

Ces dispositifs, de classe 1 ou 2, s’ils contiennent des phtalates (plastifiants du polychlorure de vinyle classés comme carcinogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction) doivent faire apparaître dans leur étiquetage leur contenu.

Si ces dispositifs sont utilisés pour le traitement d’enfants ou de femmes enceintes (ou allaitant), le fabricant doit fournir une justification spécifique pour l’utilisation de ces substances.

Il doit en conséquence démontrer que les exigences essentielles ont été respectées tant dans la documentation technique que dans la notice d’utilisation. Il doit par ailleurs informer ces patients sur les risques résiduels et, le cas échéant, sur des mesures de précaution appropriées.

III - Conditions conférant au logiciel la qualité de dispositif médical

La directive 93/42 évoque la notion de logiciel en précisant que le logiciel, « nécessaire pour le fonctionnement du DM » pouvait avoir la qualité de DM. Elle ajoute que le logiciel en question a obligatoirement la même classe que le DM sur lequel il agit ou qu’il commande.

Alors que la directive 93/42/CEE n’indiquait pas si un logiciel pris isolément constituait ou non un dispositif médical, la directive 2007/47 indique qu’« un logiciel en lui-même est un dispositif médical lorsqu’il est spécifiquement destiné par le fabricant à être utilisé dans un ou plusieurs buts médicaux figurant dans la définition du dispositif médical ».

Par conséquent, un logiciel à usage général utilisé dans un environnement médical n’est pas un dispositif médical.

Le critère déterminant continue à être la destination spécifique donnée par le fabricant sur l’utilisation du dispositif.

Concernant les exigences relatives à la conception et à la construction, les dispositifs qui incorporent des logiciels ou qui sont eux-mêmes des logiciels médicaux, doivent être validés sur la base de l’état de l’art, en tenant compte des principes du cycle de développement ainsi que de gestion des risques, de validation et de vérification.

S’agissant des critères utilisés pour déterminer la classification des dispositifs médicaux, tout logiciel autonome, depuis l’adoption de cette directive est considéré comme un dispositif médical actif.

IV - L’évaluation clinique des dispositifs médicaux

1) Nouvelle définition des données cliniques

La directive 2007/47/CE prévoit une évolution de la définition du terme « données cliniques ». Il s’agit des informations relatives à la sécurité et aux performances obtenues dans le cadre de l’utilisation clinique d’un dispositif.

Les données cliniques proviennent :

- des investigation (s) cliniques (s) du dispositif concerné ; ou

- des investigation (s) clinique (s) d’autres études citées dans la littérature scientifique d’un dispositif similaire pour lequel la preuve de l’équivalence avec le dispositif concerné peut être démontrée ; ou

- des rapports, publiés ou non, relatifs à une autre expérience clinique acquise sur le dispositif concerné ou un dispositif similaire pour lequel l’équivalence avec le dispositif concerné peut être démontrée.

Cette nouvelle définition du terme « données cliniques » est essentielle car elle liste précisément les différentes sources pouvant être à l’origine de ces données permettant de démontrer la sécurité et les performances d’un dispositif médical.

Il est à noter également que le fabricant peut constituer ses données cliniques de différentes façons comprenant notamment, comme précédemment, un recueil de la littérature scientifique, des données issues d’investigations cliniques, mais également les résultats d’investigations cliniques d’un autre dispositif médical qui serait équivalent.

Enfin, rien n’interdit, bien au contraire, à un fabricant de réaliser une compilation de l’ensemble de ces éléments pour bénéficier de données cliniques pertinentes.

2) Accroissement de l’exigence de l’évaluation clinique de certains DM

Les principales modifications apportées à l’annexe 10 relative à l’évaluation clinique concernent pour l’essentiel les dispositions générales entourant toute évaluation clinique.

Tout d’abord, alors que la directive 93/42/CEE précisait que les exigences concernant les caractéristiques et les performances d’un DM devaient être fondées sur des données cliniques, particulièrement s’agissant des dispositifs implantables et les dispositifs de classe III, les modifications apportées par le nouveau texte tendent à élargir la nécessité de disposer de données cliniques pour l’ensemble des classes des dispositifs médicaux.

En effet, le point 1.1 de cette annexe précise que les exigences concernant les caractéristiques et les performances du dispositif ainsi que l’évaluation des effets secondaires et du rapport risque/bénéfice doivent être fondées sur des données cliniques.

Cette évaluation clinique doit être effectuée dans le strict respect d’une procédure et une méthodologie consistant en :

« - une évaluation critique de la littérature scientifique pertinente actuellement disponible au sujet de la sécurité, des performances, des caractéristiques de conception et de la destination du dispositif démontrant :

- l’équivalence du dispositif auquel se rapporte les données et,

- le respect des exigences essentielles concernées ;

- une évaluation critique des résultats de toutes les investigations cliniques réalisées ;

- une évaluation critique de la combinaison des données cliniques ci-dessus. »

Par ailleurs, ces dispositions générales sont complétées par de nouveaux points.

Il ressort de ces derniers une quasi obligation de mener des investigations cliniques sur les dispositifs médicaux de la classe III et les dispositifs implantables, sauf à démontrer pour le fabricant que les données cliniques existantes peuvent être utilisées.

Lorsque l’évaluation clinique n’est pas considérée comme appropriée, cette exclusion doit être obligatoirement basée sur les résultats de la gestion des risques et doit tenir compte de l’interaction entre le dispositif et le corps humain, les performances cliniques et les revendications du fabricant.

Toutefois, si la démonstration de la conformité aux exigences essentielles est fondée uniquement sur l’évaluation de la performance, les bancs d’essai et l’évaluation pré-clinique, la validité de cette démonstration doit être dûment étayée. Notons que la documentation technique du dispositif en question devra contenir l’évaluation clinique et ses résultats ou du moins une référence de ceux-ci.

3) Matériovigilance au cours des investigations cliniques et suivi clinique post marquage CE

La directive 2007/47/CE marque un renforcement de la matériovigilance dans le cadre de l’évaluation clinique des dispositifs médicaux. Elle précise que « tous les évènements indésirables graves doivent être intégralement enregistrés et communiqués immédiatement à l’ensemble des autorités compétentes des Etats membres dans lesquels sont réalisées les investigations cliniques. »

Cette disposition vise à harmoniser les règlementations encadrant l’évaluation des dispositifs médicaux dans chaque Etat membre et évite de créer des distorsions de concurrence entre les fabricants de différents Etats membres devant mener l’évaluation clinique de leurs dispositifs médicaux.

Il est à souligner, également, l’importance de la mise à jour active de l’évaluation clinique menée préalablement, par la mise en place d’un suivi clinique quasi systématique destiné à surveiller le dispositif après sa commercialisation, sauf à justifier et documenter l’absence d’une telle nécessité.

V - Retraitement des DM

Le retraitement des dispositifs médicaux est une pratique non unifiée au sein des pays membres de l’Union Européenne.

En effet, certains pays membres disposent d’une législation plus souple, autorisant la réutilisation des dispositifs en principe destinés à un usage unique, tout en garantissant à l’utilisateur final des conditions selon lesquelles toutes les normes de sécurité et d’innocuité sont respectées.

Il existe actuellement un manque de clarté sur la signification du terme « usage unique » pour les dispositifs médicaux.

La mention appliquée par le fabricant selon les dispositions de la directive 93/42/CE telle qu’on l’a connue est comprise dans certains états membres comme interdisant tout retraitement. Au contraire les Etats membres qui autorisent un retraitement contrôlé sont d’avis que la question du retraitement ne dépend que des critères objectifs correspondant à des normes élevées de qualité et de sécurité.

Conscient de ces écarts et pour assurer l’uniformité dans un domaine aussi sensible que celui de la santé publique, le législateur européen à réagi dans le sens d’un audit de ces pratiques.

Aussi, la directive 2007/47 CE contient un nouvel article 12 bis selon lequel : « Au plus tard le 5 septembre 2010, la Commission présente au Parlement européen et au Conseil un rapport sur la problématique du retraitement des dispositifs médicaux dans la Communauté.

À la lumière des conclusions de ce rapport, la Commission soumet au Parlement européen et au Conseil toute proposition complémentaire qu’elle juge appropriée pour garantir un niveau élevé de la protection de la santé. »

La mention « usage unique » doit donc être comprise comme limitant la responsabilité du fabricant au premier usage du dispositif, et non comme indiquant une inaptitude au retraitement.

D’ores et déjà, la directive 93/42/CEE est complétée par une définition des dispositifs à usage unique selon laquelle il s’agit d’« un dispositif destiné à être utilisé une seule fois pour un seul patient ».

La directive précise par ailleurs, au titre des informations à fournir par le fabricant que :

« le cas échéant, une indication précisant que le dispositif est à usage unique. Une indication par le fabricant de l’usage unique doit être uniforme dans l’ensemble de la Communauté ;

(…)

Si le dispositif porte une indication précisant que le dispositif est à usage unique, des informations sur les caractéristiques connues et les facteurs techniques connus du fabricant qui pourraient présenter un risque si le dispositif devait être réutilisé. Si, conformément au point 13.1, aucune notice d’utilisation n’est nécessaire, l’information doit être rendue disponible pour l’utilisateur sur demande ; »

Ainsi, en conclusion, si les modifications apportées par cette directive semblent dosées sans ajouts majeurs, ni retraits fracassants, il faudra noter ses principaux apports :

  • Les DM incorporant un principe actif (médicament) relève de la directive 2007/47/CE et non de la directive concernant les médicaments à usage humain ;
  • L’étiquetage des DM doit être précis, notamment s’agissant des dispositifs contenant des produits dangereux, et il doit indiquer les risques et les raisons de l’incorporation de cette substance ;
  • Désormais, un logiciel pris isolément peut être considéré comme un dispositif médical s’il est destiné à une utilisation médicale ;
  • La nécessité de disposer de données cliniques est élargie à tous les DM et la matériovigilance dans le cadre de cette évaluation est renforcée ;
  • Le fabricant doit prévoir un suivi clinique post marquage CE sauf à démontrer l’absence d’intérêt d’un tel suivi ;
  • La réutilisation des DM est plus strictement encadrée : l’usage unique doit être obligatoirement indiqué, ainsi que les risques qu’entraînerait une réutilisation.