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Le durcissement par Bercy du barème des pénalités fiscales en cas de régularisation d’avoirs étrangers

Consécutivement à la décision du Conseil constitutionnel du 22 juillet 2016 [1] qui a déclaré contraire à la constitution l’amende proportionnelle de 5% en cas de non déclaration de comptes à l’étranger, le Gouvernement a décidé de relever le taux des pénalités applicables pour les demandes de régularisation déposées à compter du 15 septembre 2016.

Pour rappel, l’article 1736 IV-2 du code général des impôts prévoyait une amende de 1 500 euros par compte à l’étranger non déclaré, dont le montant était porté à 10 000 euros si le compte se situait dans un Etat ou territoire non coopératif.

L’alinéa 2 de cet article prévoyait, et c’est ce sur quoi le Conseil avait à se prononcer, que « Si le total des soldes créditeurs du ou des comptes à l’étranger non déclarés est égal ou supérieur à 50 000 € au 31 décembre de l’année au titre de laquelle la déclaration devait être faite, l’amende par compte non déclaré est égale à 5 % du solde créditeur de ce même compte, sans pouvoir être inférieure aux montants prévus au premier alinéa du présent 2 [1500 euros ou 10 000 euros ] ».

Les juges de la rue Montpensier ont estimé qu’en sanctionnant d’une telle amende proportionnelle n’importe quel manquement à une obligation déclarative, le législateur avait instauré une sanction manifestement disproportionnée à la gravité des faits qu’il a entendu réprimer. Ils ont par conséquent déclaré contraire à la Constitution cet alinéa sans toutefois remettre en cause l’amende de 1 500 ou 10 000 euros.

A raison du manque à gagner lié à cette décision du Conseil constitutionnel, le Gouvernement a répliqué, dans l’objectif affiché de lutter contre la fraude fiscale, par une circulaire du 14 septembre 2016 prévoyant une majoration des taux de pénalités applicables aux repentis fiscaux régularisant leur situation auprès du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR).

Initialement, dans le cadre du dispositif transactionnel prévu à l’article L. 247 3° du livre des procédures fiscales il était prévu :

  • une majoration de 15% pour les fraudeurs dits « passifs » c’est-à-dire ceux ayant reçu les avoirs dans le cadre d’une succession ou donation ou ayant constitué les avoirs alors qu’ils résidaient à l’étranger. Ce taux est désormais passé à 25%.
  • Une majoration de 30% pour les fraudeurs dit « actifs » c’est à dire ceux ayant organisé leur évasion fiscale. Ce taux est désormais passé à 35%.

Ces nouveaux taux de majorations sont applicables aux demandes de régularisation déposées à compter du 15 septembre 2016.

En tout logique ces nouvelles pénalités ne devraient en principe pas concerner les contrats d’assurance-vie et les trusts détenus à l’étranger qui n’ont pas été déclarés.

En effet, la censure du Conseil constitutionnel ne porte que sur les dispositions du second alinéa du paragraphe IV.2 de l’article 1736 du CGI relatif aux comptes bancaires détenus à l’étranger. Le Conseil n’a pas eu à se prononcer sur les sanctions en matière de non déclaration de trusts prévues à l’article 1736 IV bis du CGI et de contrats d’assurance-vie prévues à l’article 1766 du CGI.

Cependant, il ne ressort de la circulaire du 14 septembre 2016 aucune distinction de traitement entre d’une part les comptes bancaires et d’autre part les contrats d’assurance-vie et les trusts.

Par conséquent, il semble que la volonté du Gouvernement soit d’appliquer les nouveaux taux de majoration en matière transactionnelle indistinctement à tous ces dispositifs.

En tout état de cause, rien n’a encore été prévu pour remplacer le dispositif de l’amende proportionnelle de 5%. Tout laisse à penser que le Gouvernement devrait prochainement présenter un nouveau mécanisme afin de pallier à l’inconstitutionnalité de ce dispositif.

[1Décision n° 2016-554 QPC du 22 juillet 2016